Par Louis Nga Abena – louisngaabena@yahoo.fr
Joseph Engwat a du pain sur la planche. Connu comme étant l’ancien directeur général (DG) de la Société de développement du cacao (Sodecao), il a affaire à M. Yene Mbarga. Ce dernier se bat bec et oncle pour obtenir l’annulation de son titre foncier devant le Tribunal administratif de Yaoundé. Le titre foncier contesté couvre jusqu’ici un terrain d’une superficie de 13 hectares se trouvant dans un village de l’arrondissement de Nkol-Afamba. L’ancien haut commis de l’Etat est accusé de fraude foncière.
Il y a deux ans, le 20 janvier 2019, le tribunal saisi par M. Yene Mbarga avait effectué une première descente sur la parcelle à problème. M. Engwat qui n’était pas au courant de la descente du tribunal s’était introduit dans la procédure en intervention volontaire.
Lors de l’audience du 13 mars 2021, l’ancien DG a demandé au tribunal d’effectuer une seconde descente sur le terrain litigieux afin de lui permettre de faire valoir ses arguments. Les juges ont accepté sa demande en fixant le coût de leur descente à 300 mille francs.
Bien avant le juge-rapporteur qui a préalablement examiné l’affaire pour le compte du tribunal a exposé les arguments des différents camps. Dans cette affaire, M. Yene Mbarga explique que M. Engwat avait proposé à ses parent une occupation temporaire arguant de la création d’une cacaoyère. Mais plus tard il s’est fait établir un titre foncier sur le site par une procédure d’immatriculation directe. Il indique qu’au moment où le mis en cause engage l’établissement du titre attaqué, son parent M. Ayissi Yene Cyrile avait déjà introduit sa demande d’un titre foncier sur le même terrain en 1998 sur une superficie de 20 hectares. Il qualifie de mensongers les documents dont se prévaut le mis en cause pour justifier l’achat du terrain litigieux.
S’agissant des allégations de fraude foncière, le plaignant estime que l’ancien DG de la Sodecao ne méritait pas d’obtenir un titre foncier par immatriculation directe sur le terrain disputé n’étant pas originaire de Nkol-Afamba mais du département de la Sanaga Maritime. Il s’appuie sur les dispositions de l’article 9 du décret du 27 avril 1976 fixant les conditions d’obtention du titre foncier : «sont habilités à solliciter l’obtention d’un titre foncier sur une dépendance du domaine national qu’elles occupent ou exploitent, les collectivités coutumières, leurs membres ou toute autre personne de nationalité camerounaise à condition que l’occupation ou l’exploitation soit antérieur au 5 août 1974».
«Je suis choqué»
A l’opposé, M. Engwat rejette tous les griefs mis à sa charge. Il affirme avoir acheté le terrain litigieux auprès du défunt parent du plaignant. Le défunt lui avait cédé les droits coutumiers qu’il détenait sur les lieux. Toute chose qui lui «confère le droit à une procédure d’immatriculation directe». Il indique que toutes les oppositions formulées lors de l’immatriculation de son terrain avaient été levées. Il a créé une vaste cacaoyère sur les lieux. Le juge-rapporteur a suggéré au tribunal d’annuler le foncier titre attaqué sur la base des constations observées lors de la première descente du tribunal sur le terrain disputé.
Engwat s’est ensuite brièvement expliqué devant la barre. Toute de blanc vertu il s’est dit «tellement choqué». «C’est vrai que le dossier est devant vous, mais j’aimerais savoir si la famille Yene Mbarga a effectivement soutenu dans son recours que M. Ayissi ne m’a pas vendu le terrain ?», interroge l’ancien DG. Il dit avoir dépensé beaucoup d’argent pour mettre le terrain en valeur. Il a donné lecture des extraits des déclarations que feu Yene Mbarga aurait fait par exploit d’huissier justice. Dans ces extraits, le défunt remercie M. Engwat pour tout le bien le concerné a fait pour lui. Il indique qu’on ne devra rien réclamer à l’ancien DG parce que M. Engwat lui a tout donné. M. Engwat n’a pas hésité de vanter ses états de service en égrenant les différentes fonctions qu’il a occupé dans l’administration publique. Méritait-il d’obtenir le titre foncier contesté par immatriculation directe. C’est ce que le tribunal ira à nouveau vérifier sur son terrain à problème.