Par Louis Nga Abena – louisngaabena@yahoo.fr
L’inspecteur d’Etat Joseph Mpouli Mpouli est décidément un bourreau en même temps un sauveur. Jusque-ici, unique témoin à charge dans la seconde affaire Bekolo Ebe pendante devant le Tribunal criminel spécial (TCS), le concerné est aussi celui sur qui les mis en cause comptent pour prouver leur innocence clamée par rapport aux différents griefs mis à leur charge.
Déjà entendu par le tribunal comme témoin du parquet dans cette procédure, M. Mpouli Mpouli, actuel inspecteur général au ministère des Mines, de l’Industrie et du Développement technologique, a de nouveau été entendu par les juges le 17 août 2021, cette fois comme témoin de la défense. C’est Augustin Marie Mboudou, l’ex-directeur des affaires administratives et financières (DAF) de l’Université de Douala, en jugement pour le détournement présumé de 331 millions de francs [lire Kalara N° 395 du 17 août 2021] qui l’a cité comme témoin.
M. Mpouli faisait en effet partie de la mission de vérification du Contrôle supérieur de l’Etat (Consupe) dépêchée à l’Université de Douala en 2010 pour passer à la loupe la gestion du recteur Bruno Bekolo Ebe et ses proches collaborateurs durant les exercices budgétaires 2007 à 2010. Cette mission a imputé des irrégularités à certains dirigeants audités. Et c’est le rapport de cette mission de vérification qui est à la base des poursuites judiciaires voire disciplinairse engagées contre certains dirigeants de l’université d’Etat, dont M. Mboudou qui est en jugement devant le TCS pour cinq supposées irrégularités constatées dans sa gestion.
«La mission n’a rien vu»
Sur le premier chef d’accusation, on fait le reproche à M. Mboudou d’avoir distrait 36 des 70 millions de francs destinés à l’achat des livres des bibliothèques de l’Université de Douala en 2008. Selon l’accusation, les fonds litigieux étaient logés dans une caisse d’avance dont l’accusé était le régisseur (gérant). Avant d’interroger M. Mpouli sur ce grief, l’avocat de M. Mboudou a lu les extraits des déclarations qu’il a faites pendant l’information judiciaire. Dans ces extraits, le témoin indique que l’ex-DAF n’a justifié que la moitié des fonds querellés devant la Mission du Consupe. «Avez-vous vu les traces de l’approvisionnement de ce compte mis à la disposition de l’accusé ?», interroge l’avocat. «La mission n’a pas vu la trace de décharge des fonds par M. Mboudou. Toutes les opérations ont été réglées au niveau de l’agent-comptable. Il a été désigné régisseur mais n’a pas eu à manipuler les fonds», répond M. Mpouli. «Est-il possible à un régisseur d’un compte d’avance de justifier de l’utilisation des fonds qui n’ont pas été mis à sa disposition ?», poursuit l’avocat. Le témoin répond par la négative.
On fait également le reproche à M. Mboudou d’avoir distrait 290 millions de francs à travers «l’achat fictif» des cahiers de compositions des étudiants de l’Université de Douala. L’avocate de M. Mboudou va rappeler au témoin que lors de son interrogatoire par le ministère public le 22 décembre 2020, il avait affirmé qu’il ne percevait pas la responsabilité de M. Mboudou dans l’irrégularité «relative aux cahiers de composition». M. Mpouli va réaffirmer ses déclarations, précisant que la gestion des documents litigieux incombe au comptable-matières. L’accusation n’a posé aucune question au témoin dont les déclarations ont parfois suscité un chahut dans la salle. Il comparaîtra de nouveau comme témoin des autres accusés. L’affaire est renvoyée les 5, 6 et 12 octobre prochain pour la poursuite des débats.
Rappelons que M. Mboudou, le Pr Bruno Bekolo Ebe et Louis-Max Ayina-Ohandja, l’ex-directeur de l’UIT de Douala croupissent à la prison centrale de Yaoundé pour de supposées irrégularités décelées dans leur gestion à l’Université de Douala. Le 13 juillet dernier, le Tribunal administratif de Yaoundé a annulé 24 des 27 fautes de gestions retenues contre l’ex-recteur par la mission de vérification du Consupe pour cause d’un parti-pris manifeste.