Par Marie B. Welao (Stagiaire) welaomari@gmail.com
Après avoir consenti du temps et des sacrifices pour bâtir une maison de retraite située au quartier Biyem-Assi, à Yaoundé, M. Kwacheu un infirmier à la retraite, est dans le désarroi. Il se plaint du fait que le fruit de ses efforts consentis pendant de nombreuses années pour bâtir une maison familiale, est désormais la propriété de M. Kenfack, l’actuel occupant des lieux. Il accuse Me Tsapong Nguepi Paulette, collaboratrice de Me Firmin Ada à l’époque des faits, la seule qui comparaît, Me Tchuenkam, notaire de regrettée mémoire et son épouse d’être les auteurs de ses malheurs. C’est la raison pour laquelle, il poursuit ces trois personnes pour les faits d’escroquerie aggravée devant le Tribunal de grande instance (Tpi) du Mfoundi.
Il ressort des débats que M. Kwacheu et ses 7 enfants avaient été expulsés de leur domicile suite à une prétendue vente qui avait hypothéqué son titre foncier devant Me Tsapong Nguepi Paulette. La vente litigieuse avait été effectuée sous l’impulsion de feu Me Tchuenkam avec la complicité de Mme Kwacheu Jacqueline qui a pris la clé des champs après son forfait. Le 21 mai 2021 Me Nguepi Paulette était seule dans le banc des accusés pour donner sa version des faits qui lui sont reprochés par le plaignant présent dans la salle d’audience.
Kwacheu a expliqué qu’il souffre des troubles mentaux et est pris en charge à l’hôpital Jamot de Yaoundé. Il relate que son épouse profitant de son handicap mental, l’a déterminé en 2010 à mettre en hypothèque son titre foncier pour «une affaire». Il dit avoir signé un engagement au cabinet de Me Tsapong Nguepi Paulette dans des papiers blancs au bas desquels, il lui avait était demandé d’émarger. Au moment de la signature desdits documents, M. Kwacheu déclare avoir attiré l’attention du notaire sur son handicap en lui présentant son carnet d’invalidité que cette dernière n’a pas pris la peine de consulter.
Dans la suite de son récit, le plaignant a expliqué son épouse Mme Kwacheu Jacqueline entretenait une relation d’affaires avec les deux notaires. Ne pouvant rembourser la dette de 120 millions de francs qu’elle devait à Me Tchuenkam, cette dernière a vendu à M. Kenfack la maison familiale. M. Kwacheu raconte avoir été expulsé du domicile querellé en 2015 ainsi que ses sept enfants à la suite de cette vente.
Acte de vente contesté
Pour sa défense, Me Nguepi Paulette a nié les faits qui lui sont imputés. Elle déclare avoir bien fait son travail à l’époque où elle était collaboratrice de Me Pierre Firmin Ada. Elle relate avoir reçu le couple Kwacheu dont elle n’avait pas connaissance au préalable le 6 décembre 2010, soit quatre jours après leur rencontre avec le regretté Me Tchuenkam. Elle déclare avoir dressé l’acte de vente de cette maison à la demande du disparu le même jour avec le consentement du couple Kwacheu dont les signatures figurent dans l’acte de vente contesté. Elle a souligné que le couple lui disait avoir engagé des pourparlers pour une transaction immobilière avec Me Tchuenkam et qu’elle ne reconnait pas que le plaignant avait fait état de ses troubles mentaux pendant la signature dudit acte.
Me Nguepi Paulette soutient que c’est le plaignant qui lui avait remis son titre foncier en toute conscience et librement en présence de son épouse. Elle souligne en outre que les signatures des deux époux au bas du document litigieux attestent de leur accord. L’accusée dit n’avoir perçu aucun sou dans cette transaction qui avait été faite directement entre le couple Kwacheu et son confrère. Néanmoins, elle a dit avoir suivi les propos de Mme Kwacheu, qui affirmait que l’argent versé au couple par Me Tchuenkam aurait servi à résoudre les problèmes de leurs enfants. L’accusée a également indiqué qu’en 2015, le titre foncier querellé a connu une mutation au nom de l’actuel occupant et que le dossier traitant de cette affaire est resté au cabinet de Pierre Firmin Ada.
Dans ses réquisitions, le représentant du parquet, a demandé l’arrêt des poursuites contre Me Tchuenkam. Il a évoqué l’article 62 alinéa 1 a du Code pénale qui dispose que «l’action publique s’éteint par la mort du suspect, de l’inculpé, du prévenu, ou de l’accusé».
S’agissant de Mme Kwacheu absente à l’audience, il a demandé qu’elle soit déclarée coupable des faits d’escroquerie. «Après avoir conduit son époux malade à l’étude Pierre Firmin pour signer l’acte de vente querellé, elle a perçu la totalité des fonds qui ont circulé dans le cadre de cette affaire. Sa disparition démontre à suffire qu’elle se reproche de quelque chose », a déclaré le magistrat du parquet.
Pour ce qui est de Me Nguepi Paulette, le ministère public s’est remis à la sagesse du juge car il estime qu’il y a un doute qui plane sur son cas. «Ici c’est la parole du plaignant contre celle de l’accusée», a-t-il conclu son propos.
Dans sa plaidoirie, l’avocat de Me Nguepi a fondé ses arguments sur la matérialisation de l’acte de vente dressé par sa cliente qui relevait du travail d’un notaire pour dire que sa cliente n’est coupable d’aucun délit. Il estime qu’au cours des débats, à aucun moment, il n’a été dit que sa cliente a été en contact avec l’argent perçu par Mme Kwacheu. II conclut qu’elle ne peut donc pas être accusée des faits d’escroquerie qui lui sont reprochés. Le juge compte rendre sa décision sur cette affaire le 18 juin prochain.