Ingénieur de conception en génie mécanique, ex-employé dans une entreprise en Russie, Constantin Mba s’est retrouvé empêtré dans une histoire de visas fictifs qui lui vaut un séjour à la prison centrale de Yaoundé Kondengui depuis quelques mois. En plaidant coupable le 8 octobre 2021 devant le tribunal, il espère la clémence pour la peine à purger après avoir berné une dizaine de filles désirant se rendre en Europe. Un aveu qui n’a pas empêché les trois victimes présentent à l’audience de réclamer leur dû, environ 10 millions de francs engloutis en 2019 par le mis en cause et ses complices.
Le doigt levé pour exprimer le désir de prendre la parole pour enfoncer le clou de l’accusation menée par le ministère public, les plaignantes ont donné des détails sur le mode opératoire de leur arnaqueur «russe». Mlles Jeanne Kameni, Diffo Magazou, et Kelefack Nanfang ont raconté des faits presque similaires qui remontent à 2019. Elles avouent toutes avoir été approchées par une «sœur en Christ» (membre d’une congrégation religieuse d’une église de réveil), connaissant leur désir d’immigrer, qui leur a dit connaitre un «démarcheur» qui pourrait leur faire facilement obtenir des visas pour des pays européens. Le doute est rapidement dissipé puisqu’elle leur présente également ce dernier comme un «frère en Christ». Ils vont échanger via les réseaux sociaux pour s’accorder sur les modalités pratiques, car il se trouve encore en Russie. Une entreprise de voyage fictive est même spécialement créée pour le coup. On l’appelle Fidi Sarl.
Contacts injoignables…
Constantin Mba, considéré comme le cerveau de l’arnaque, était celui qui donnait les directives aux filles pour les documents à obtenir et les personnes à qui remettre ou envoyer les fonds nécessaires. Ses victimes précisent que chaque fois, il se rassurait qu’aucun versement ne soit fait en son nom, alors qu’il en était l’ordonnateur. Par personnes interposées, il parvenait donc à brouiller les pistes et à rendre les présumées procédures complexes afin d’embrouiller ses victimes. Chacune confie avoir fait des transactions de plus de 3,7 millions de francs en faveur de Fidi Sarl.
Tout au long de la quête des visas, les jeunes femmes expliquent qu’il leur faisait parvenir des vidéos des documents signés par des autorités compétentes pour prouver sa bonne foi et les mettre en confiance. Avec l’assurance de la «sœur en Christ», elles n’y ont vu que du feu. C’est lorsque leurs différents contacts deviennent injoignables que le doute s’installe chez les victimes. Fidi Sarl va également fermer ses portes. Les trois victimes à l’audience révèlent aussi que Constantin Mba est poursuivi en Russie, pays qu’il a dû quitter, pour les mêmes faits. Elles informent par ailleurs le tribunal qu’une autre procédure existe au Cameroun contre le même accusé, cette fois avec des victimes différentes.
Pour soutenir leur accusation, les victimes présentent des reçus des transactions avec les complices de leur arnaqueur. Elles proposent aussi les vidéos envoyées par leur «démarcheur» montrant les signatures. Malheureusement, les documents ne sont pas «en la forme requise», c’est-à-dire en copies certifiées conforme ou en originaux, pour être retenus comme pièces à conviction dans le procès. Un renvoi au 12 novembre 2021 a été concédé aux jeunes dames pour les régulariser et chercher d’autres preuves de la supercherie dont elles ont été victimes.