«Nous sommes devant vous aujourd’hui parce que j’ai osé réclamer mes droits à cet homme qui se dit tout puissant.» C’est en ces termes que Mme Guebediang à Koung Marianne épse Belibi a entamé son témoignage devant la barre du Tribunal de première instance (TPI) de Yaoundé centre administratif le 23 septembre 2021. Elle accuse son ancien employeur, M. Edoung Paul, directeur général de l’hôtel Safari à Yaoundé et son entreprise, civilement responsable, des infractions qualifiées de fabrication et suppression des preuves et déclarations mensongères. Le mis en cause, qui est libre de ses mouvements, nie les faits en bloc. Après plusieurs renvois, les débats ont finalement été ouverts dans cette affaire en présence de toutes les parties opposées au procès.
Mme Guebediang a expliqué au tribunal qu’elle a été recrutée à l’hôtel Safari en 2004 en qualité de comptable. Sauf que les rapports professionnels qui les liaient se sont transformés en une relation amicale. La plaignante déclare que dans cet établissement hôtelier, les employés désireux de se marier bénéficiaient gratuitement de la salle de fêtes dont le coût de réservation est fixé à 500 mille francs. Profitant de ce privilège, elle dit avoir organisé son mariage dans l’une des salles qu’offre l’hôtel Safari le 26 juillet 2014 sur le thème «vert et or». M. Edoung Paul, son patron, était alors son témoin à cette cérémonie nuptiale. Un an après, Mme Guebediang dit avoir été licenciée après 11 ans de service. Sommé de lui payer ses indemnités, l’accusé a réagi par une sommation en réplique, dans laquelle il déclare que la plaignante a organisé son mariage dans la salle de fêtes de son hôtel sans s’acquitter des frais de réservation. Pourtant, la dame dit n’avoir jamais été soumise à cette exigence. «Quand j’ai organisé mon mariage, mon patron ne m’a jamais demandé de payer un montant pour la salle de fêtes. C’était gratuit. On n’avait aucun problème, la preuve en est qu’il apparaît tout souriant sur les photos de mariage où il était d’ailleurs le témoin», a-t-elle déclaré. L’autre grief retenu contre M. Edoung Paul est le fait que dans la sommation en réplique présentée à l’inspection du travail, il avait indiqué que le thème du mariage de Mme Guebediang était rose et bleu au lieu de vert et or.
Déterminée à rentrer en possession de ses droits de licenciement qu’elle évalue à 3,7 millions de francs, Mme Guebediang avait saisi l’inspection du travail. Après plusieurs assises, M. Edoung Paul lui avait seulement versé la somme de deux millions de francs. Il avait retenu le reliquat prétextant qu’il représentait la compensation de sa créance. «Il m’a dit que si je veux rester tranquille tout au long de ma vie, je dois abandonner mes droits. Il ne m’a jamais remis le 1,7 million restant jusqu’à ce jour.» Pour convaincre le tribunal de ses allégations, Mme Guebediang a fait comparaitre Mirabelle Sama comme témoin. Cette dernière, partie de l’hôtel Safari depuis le 20 novembre 2011, dit ne pas avoir assisté à la réunion de 2014 comme veut le faire croire M. Edoung Paul.
Pour sa défense, le patron de Safari hôtel a présenté un listing du personnel qui avait pris part à une réunion qu’il aurait organisée en 2014, en prélude à la cérémonie de mariage de Mme Guebediang. Au cours de la réunion en question, il avait été décidé, dit-il, que son comptable devait s’acquitter des frais de location de la salle de fêtes au même titre que tous les autres clients de l’hôtel. Ensuite il a déclaré que les réservations de la salle de fêtes se font à la réception et a indiqué que la plaignante avait bel et bien fait une réservation dans le registre de l’hôtel. Pour soutenir son argumentaire, il a produit la photocopie de la souche de cette réservation mais celle-ci a été rejetée par le tribunal, qui souhaite avoir l’original ou la copie certifiée conforme de ce document.
En réaction aux déclarations de l’accusé, la plaignante a retorqué que les personnes citées dans la liste du personnel produite par son ancien employeur, n’étaient plus employées par l’hôtel à l’époque des faits querellés. Elle a indiqué que six d’entre elles, avaient démissionné depuis 2011. Elle soutient en outre que le listing que son ex patron avait présenté à l’inspection du travail faisait état d’une réunion tenue plutôt en 2011 et n’avait aucun lien avec son mariage. Le tribunal a reporté l’affaire à l’audience du 28 octobre 2021 pour la suite des débats.