Par Odette Melingui – odettemelingui2@gmail.com
Peut-on ouvrir la succession d’un défunt sans produire son acte de décès? Le Tribunal de premier degré (TPD) de Yaoundé a répondu à cette question par la négative. C’était à l’occasion d’une de ses audiences statuant en matière de droit local le 28 avril 2021. Une affaire de succession a particulièrement retenu son attention. C’est Merveille, une jeune fille de 24 ans, qui a saisi cette juridiction. Elle veut obtenir le jugement d’hérédité de sa maman. Cette dernière est décédée en 2018, des suites d’un accident de la circulation. Pour donner de la valeur à sa requête, Merveille s’est fait accompagner dans cette procédure par son papa, ses frères et sœurs, ainsi que ses témoins, tous membres proches de sa famille.
Dès l’appelle du dossier, la dame s’est présentée devant le juge, suivie des autres protagonistes concernés par l’affaire. Elle s’emblait sereine, et sûr d’elle. Elle croyait certainement que son affaire allait passer comme une lettre à la poste. En effet, Merveille a relaté au tribunal que sa maman, fonctionnaire de police, était mariée à leur père sous le régime de la polygamie, mais ce dernier n’a pas pris une seconde épouse. De ce mariage sont nés quatre enfants, le cadet est aujourd’hui âgé de trois ans. La défunte a également accumulé les biens matériels et avait un compte bancaire bien fourni. Elle avait à peine 35 ans, lorsqu’elle est décédée en 2018 des suites d’un accident de la route. Choquée par cette disparition brusque, la famille n’a toujours pas fait son deuil. Tout au long des débats, les pleurs et les cris de lamentations se faisaient ressentir pendant la prise de parole des membres de la famille, qui n’ont pas, pour certains, retenu leur émotion. «Ma sœur est partie très tôt laissant derrière elle ses enfants en bas âge. La douleur est grande, et insurmontable. Quand je voie mes neveux, j’ai toujours les larmes aux yeux», a déclaré la sœur ainée de la défunte.
Acte égaré ?
Après le décès de la policière, la famille s’est réunie et un procès-verbal de conseil de famille a été établi. Dans ce document qui a été produit au dossier de la procédure, tous les enfants de la défunte ont été désignés cohéritiers, et Merveille, a été élevée au rang d’administratrice des biens successoraux. Pascal, le veuf, bénéficie quant à lui de son droit d’usufruitier et est le tuteur des enfants mineurs. Les sept témoins de Merveille ne s’opposent pas aux résolutions prises lors du conseil de famille.
Tout se passait comme sous des roulettes, jusqu’à ce que le tribunal décide de vérifier tous les documents qui ont été annexés dans le dossier de la procédure. «Votre dossier en l’état ne peut pas être retenu. Nous ne connaissons pas la succession de la personne que vous voulez ouvrir. Il n’y a aucun acte de décès dans le dossier, et nous ne pouvons pas poursuivre les débats», a déclaré le juge.
Surprise par cette observation, Merveille et ses témoins ont déclaré que l’acte de décès de leur mère avait bien été annexé dans le dossier de la procédure ainsi que tous les autres documents en la forme légale. En l’absence de cette pièce importante l’affaire a été renvoyée au 26 mai 2021 pour la production de l’acte de décès querellé.