C’est l’histoire de Gustave et Amélie, des mariés issus de coutumes différentes. L’homme est un chef traditionnel bamiléké, tandis que son épousé, commerçante, est béti. Marié depuis 2009 sous le régime de la monogamie et la communauté des biens. Après une longue période de concubinage, le couple a eu deux enfants, encore mineurs. C’est Amélie qui a saisi le tribunal d’une requête en divorce. Elle veut quitter l’homme qu’elle dit encore aimer, mais, qui pour elle est un grand menteur. Le chef de famille, qui s’oppose au divorce, souhaite la réconciliation.
Première à prendre la parole, Amélie a raconté au tribunal qu’elle a fait la connaissance de son homme à Yaoundé en l’an 2000. Après un an de fréquentation, elle a décidé de s’installer avec lui dans une chambre qu’il louait. Très chrétienne à l’époque, elle avait alors demandé à son homme de l’épouser avant de lui faire des enfants. La dame relate que sa vie de couple n’a jamais été un long fleuve tranquille. Malgré les manquements de Gustave, les amoureux ont décidé d’officialiser leur relation en 2009. Un mariage pompeux a été organisé en leur honneur. Deux enfants âgés respectivement de 10 et 8 ans sont venus consolider leur union. Après leur mariage civil et religieux, la mère de famille déclare que son homme est devenu distant. Il ne l’impliquait plus dans les décisions importantes de la famille. «Parfois, on se disputait, puis ça s’arrangeait. Il m’arrivait de le soupçonner d’être infidèle, car je le sais homme à femmes, très frivole. Beaucoup de scènes de ménage ont animé notre vie de couple au point de déranger le voisinage», a-t-elle déclaré.
AVC
Amélie relate également que son époux était toujours absent de la maison. Il était constamment en déplacement à l’Ouest du pays, pour des raisons familiales. De plus, ce dernier ne s’implique pas jusqu’à ce jour dans l’éducation de leurs enfants. Subitement en 2018, pour des raisons qu’elle ignorait, Gustave est totalement devenu son contraire. Il s’est transformé en un époux attentionné, amoureux, et responsable. «J’ai discuté avec lui, il m’a rassuré que cette effusion d’amour vient de son cœur. Nous les femmes avons une forte intuition. J’ai commencé à imaginer que mon mari me prépare un faux truc.» Convaincue du fait que son homme la trompait, Amélie dit avoir mené sa propre enquête. Surprise ! «J’ai découvert que mon époux est un chef traditionnel dans son village, et qu’il a épousé une femme bamiléké. Ils se sont mariés coutumièrement avant notre mariage civil, et sont parents de cinq enfants», a-t-elle confié.
En effet, la femme traditionnelle de Gustave avait décidé de s’installer à Yaoundé avec ses enfants, et le chef de famille avait alors loué un appartement à sa seconde famille. Les voyages fréquents effectués par le chef de famille étaient en réalité des prétextes pour aller remplir son devoir d’époux dans son second foyer. Pour éviter de se faire prendre, Gustave s’était arrangé à être un époux irréprochable pour ne pas éveiller les soupçons de son épouse. Après cette découverte, Amelie a eu un accident vasculaire célébrable (AVC). Dépassée par les mensonges de son époux, la dame dit avoir reçue déception, humiliation et trahison à la place du grand amour que lui avait promis son époux. «Je n’ai jamais voulu me marier sous le régime de la polygamie parce que j’aime mon mari et je ne veux pas le partager avec une autre femme. Je préfère me séparer de lui plutôt que de continuer de vivre dans l’hypocrisie », a-t-elle conclu.
Une formalité
Silencieux tout au long du témoignage de son épouse, Gustave a fini par reconnaitre les faits. Il a avoué au tribunal qu’il est le successeur de son père, et qu’en cette qualité, il a l’obligation d’épouser une femme de sa tribu avant de prendre une autre. Raison pour laquelle, dit-il, il a épousé celle qu’on appelle au village la reine-mère. A la question du tribunal de savoir pourquoi il n’a pas dit la vérité à son épouse légitime, le chef de famille déclare qu’il craignait sa réaction. «Je ne voulais pas la perdre. Je savais qu’elle était contre la polygamie, alors j’ai décidé de le faire en cachette. J’ai dissimulé cette relation pendant longtemps pour ne pas contrarier mon épouse.».
Pour ce qui est de la procédure de divorce engagée par Amélie, Gustave déclare qu’il ne veut pas dissoudre son mariage avec la femme qu’il aime. Pour lui, son mariage traditionnel n’est qu’une formalité et non un engagement. «Ma femme c’est elle et je veux vieillir à ses côtés. Je m’oppose au divorce. Je demande au tribunal de nous réconcilier si possible. J’aime encore ma femme», a-t-il conclu. L’affaire a été renvoyée à deux mois pour permettre au couple de se rapprocher et de trouver un terrain t’entente à leur problème.