Par Odette Melingui – odettemelingui2@gmail.com
Dans un coin de la salle d’audience du Tribunal de premier degré de Yaoundé la semaine dernière, se trouvait un homme plutôt serein, et heureux. Pendant sa présence dans cette pièce, il portait un enfant dans ses bras. Un garçon. La photocopie en miniature de son père. Mais, l’identité du père est restée un mystère, jusqu’à ce que son affaire soit appelée. Vêtu d’un pantalon jean de couleur noire assorti d’un t-shirt à carreaux rouge, l’homme de 38 ans environ s’est avancé d’un pas rassurant devant le juge du TPD qui connait de son affaire. Il se fait appeler Samuel. Il est venu soutenir sa requête en reconnaissance d’enfant. Pour convaincre le tribunal de la justesse de son action en justice, il a fait comparaitre Christelle, la mère de son enfant, ainsi plusieurs autres personnes présentées comme témoins de leur idylle.
Selon son témoignage, leur histoire d’amour a commencé il y plusieurs années. En dépit de son statut d’homme de Dieu, Samuel est tombé sous le charme de Christelle, son ouaille. Il lui a déclaré sa flamme et la jeune dame a accepté de devenir sa partenaire. Ils ont vécu leur amourette en cachette pendant de longues années, jusqu’à ce que Christèle tombe enceinte. Elle a donné naissance à un garçon, neuf mois plus tard. Samuel, qui à cette époque était à l’étranger pour des raisons professionnelles, n’a donc pas pu reconnaitre l’enfant à la naissance. De retour au pays, il a décidé de rectifier le tir, en introduisant une requête en reconnaissance d’enfant devant ce tribunal. Il souhaite que son nom soit inscrit sur l’acte de naissance de son fils à la place du père biologique.
Ce droit ne lui est point contesté par Christelle, qui a déclaré au tribunal que Samuel est effectivement le géniteur de son fils. Tous leurs témoins ont également chacun à son tour soutenu qu’ils ont vu les deux tourtereaux ensemble dans des positions laissant croire qu’ils entretiennent une relation intime. Ils ont en outre attesté que Samuel et Christelle sont les parents du garçon dont la reconnaissance est sollicitée.
Pour obtenir tous ces éclaircissements, le juge a dû soumettre les parents à un jeu de questions réponses. Lors de cet exercice, Samuel a justifié son absence pendant la naissance de son fils en brandissant son passeport. «Pourquoi n’avez-vous pas introduit une requête en résonnance et légitimation d’enfant ? Qu’attendez-vous pour épouser cette fille ?», va demander le tribunal. Embarrassé par les questions du juge, Samuel s’est vu dans l’obligation de présenter une pièce supplémentaire afin de justifier son identité. Il s’agit d’une carte professionnelle. «Mme la présidente, j’aimerais que ma profession reste secrète», a-t-il confié à la magistrate. Peine perdue. En annonçant la date du verdict de l’affaire, le juge a dévoilé la profession du père. «Il s’agit d’un pasteur, il est en plus marié à une autre femme sous le régime de la monogamie et la communauté des biens. Sa femme n’est pas informée de cette procédure ni de l’existence de cet enfant». Information donnée au greffier et aux accesseurs.