«Comment l’arrêté intervient alors que l’affaire est pendante ?» lance le président du collège des juges à l’annonce d’une décision du ministère des Domaines, du Cadastre et des Affaires foncières (Mindcaf) alors qu’en accord avec les autres juges le décompte des jours pour arrêter le délai de recevabilité de la requête de Gaston Ndjoumou Etoundi et ses frères avait déjà été fait. Ils s’apprêtaient à conclure à un recours hors délais, comme préconisé par le juge rapporteur, car déposé 61 jours après le recours gracieux adressé au Mindcaf. Le jour de trop était suffisant à un rejet puisque la procédure pour se plaindre au Tribunal administratif accorde un délai de deux mois, soit 60 jours, au plaignant pour introduire sa requête quand elle a été rejetée explicitement ou implicitement par le Mindcaf.
L’avocate des plaignants qui venait de faire cette annonce, avec production de la décision au tribunal, a tenté de donner les raisons de cette réponse tardive du ministère, soit après le délai de trois mois accordé. Elle voulait dès lors rattraper son allusion selon laquelle le tribunal serait obligé d’accepter la requête de ses clients puisque le Mindcaf leur avait donné un avis favorable en annulant le titre foncier attaqué. Une tentative gagnante au ministère pour défendre le terrain paternel réclamé par Gaston Ndjoumou et ses frères accordée par le Tribunal de première instance de Monatél, où l’affaire était aussi pendante.
Dans leur recours les plaignants expliquaient que leur père avait acquis un terrain en 1964 auprès d’un dénommé M. Onguéné. Ils racontent également que depuis leur naissance, leur famille est établie sur la parcelle sans aucun souci, jusqu’au décès du vendeur en 1974. L’un de ses ayants droit, Fabien Onguéné va entreprendre, quelques années plus tard, l’immatriculation de ces terres. C’est en février 1985, lors du bornage du lopin de terre que Gaston Ndjoumou et ses frères se rendent comptent qu’ils sont en train d’être exproprié. Ils s’opposent à l’immatriculation lors de la descente de la commission consultative, en 1988, mais le demandeur parvient quand même à avoir le titre foncier N43553/Lekié qu’ils attaquent devant le Tribunal administratif, en septembre 2018.
Pour l’avocat de Fabien Onguéné qui s’étonne de la « cacophonie » dans cette affaire, le tribunal est au-dessus du Mindcaf et devrait simplement annuler l’arrêté. Pour lui, c’est l’opposition émise en 1988 qui devrait suivre son cours au lieu d’introduire un autre recours pour annuler le titre foncier plus de 30 plus tard. L’argument de la lenteur du service courrier du ministère et le manque de fichier de suivi des dossiers évoqué par le représentant du Mindcaf est également balayé d’un revers de la main par l’avocat. Il sollicite du tribunal le strict respect du délai de recours et le constat du délai dépassé. Le ministère public aura le même raisonnement. Le tribunal estimera le recours recevable et le jugera cependant irrecevable sans ordonner la mutation du titre foncier au nom de Ndjoumou et ses frères.