Michel Effa Medzi a la poisse. En détention depuis novembre 2016, il passera finalement 15 ans derrière les barreaux. Le 11 mai dernier, la Section spécialisée de la Cour suprême a confirmé la peine d’emprisonnement ferme qu’il a écopée le 9 mars 2018 devant le Tribunal criminel spécial (TCS). On l’avait déclaré coupable de tentative de détournement de biens publics d’un montant de 369,7 millions de francs. Un forfait qu’il a réalisé, selon l’accusation, le 6 janvier 2015 en réclamant dans une correspondance adressée au ministre des Forêts et de la Faune (Minfof) le paiement de deux factures de livraison de 100 armes à feu destinées à la lutte contre le braconnage, alors que les mêmes factures avaient déjà fait l’objet d’un paiement en 2012.
«C’est peut-être parce que je suis patriote que je suis devant vous. C’est parce qu’il y a eu beaucoup de kongossa, le minsossi». Ces paroles prononcées par l’accusé pour sa dernière déclaration devant la cour n’ont pas réussi à le sortir d’affaires. Son pourvoi reprochait aux juges du TCS d’avoir dénaturé les faits au centre du procès. Mais la cour la a jugé cet argument non fondé.
Les démêlés judiciaires de M. Effa Medzi débutent en 2011 lorsque son entreprise, Medzi et Cie Sarl, remporte deux marchés spéciaux d’un montant de 370 millions de francs relatifs à la livraison de 100 armes au ministère des Forêts.
Les commandes étaient entièrement réglées entre le 9 janvier et le 2 février 2012 à travers des virements effectués dans un compte de l’entreprise ouvert dans la microfinance Afib. La livraison technique est intervenue le 31 décembre 2013.
Problème : le 6 janvier 2015, M. Effa Medzi avait adressé une correspondance au Minfof dans laquelle il transmettait les factures définitives et les bordereaux de livraison des marchés litigieux ainsi que le numéro d’un compte bancaire ouvert dans les livres d’Afriland First Bank. Il sollicitait un apurement et la liquidation des factures querellées. Les parties font une interprétation diamétralement opposée de la correspondance.
M. Effa Medzi prétend que lors de l’attribution des marchés litigieux, il n’avait présenté que la facture proforma en attentant obtenir les autorisations nécessaires à l’exécution de la commande. L’indication d’un numéro de compte dans sa missive constitue «tout simplement un rituel». La demande de liquidation des factures ne visait qu’à clôturer les écritures comptables.
Pour l’accusation, la démarche du mis en cause visait à extorquer les fonds à l’Etat, car la procédure de liquidation consiste à certifier le service fait, à vérifier la réalité de la dette d’un prestataire et à arrêter le montant de la dépense. Face à l’insistance de l’accusé, le ministre des forêts avait ordonné le paiement qui a été bloqué par son directeur des affaires générales, qui avait obtenu la preuve du paiement intégral des marchés par le ministère des Finances .