Pourquoi une entreprise camerounaise réclame 36,3 milliards de F à Glencore

Par Emile Kitong – ekitong@gmail.com Depuis que l’ancien Bâtonnier de l’ordre des avocats du Cameroun, Me Akere Tabeng Muna, a engagé une croisade visant à obtenir le châtiment, au Cameroun, des personnalités impliquées dans une vaste opération de corruption ayant profité à la société pétrolière Glencore, une entreprise camerounaise vient d’entrer en scène. Il s’agit de la société African Petroleum Consultants (APC) Sarl. Cette dernière a saisi le juge des référés du Tribunal de première instance (TPI) de Douala-Bonanjo pour se faire indemniser du préjudice qu’elle dit avoir subi du fait des actes de corruption avoués par Glencore devant les juridictions anglaise et américaines. Depuis le 5 janvier 2024, en effet, APC Sarl et Glencore Exploration Cameroon Ltd s’affrontent devant le juge, la première société citée réclamant un peu plus de 36 milliards de francs à son adversaire. Les faits de cette cause remontent à 1995, il y a 29 ans. APC Sarl avait signé le 18 octobre de cette année-là, avec la Société nationale de Raffinage (Sonara) alors dirigée par Bernard Eding (disparu quelques années plus tard), un contrat de livraison de deux types de pétrole : le "Bonny light" et le "Brass River". Mais ce contrat était rompu de façon unilatérale par la Sonara, de l’avis des dirigeants de APC Sarl. Et l’entreprise camerounaise était remplacée par la société Glencore, entraînant les préjudices que APC Sarl entend faire réparer aujourd’hui. Prenant acte des aveux de corruption faits en 2022 par les dirigeants de Glencore devant les juridictions anglaise et américaine pour obtenir des contrats de livraison de pétrole brut au Cameroun à la Sonara (et à la SNH), les promoteurs de APC Sarl sautent sur l’occasion pour espérer se faire indemniser. En fait, devant la South Work Crown Court de Londres, les aveux de dirigeants de Glencore avaient conduit à la condamnation de cette société. Mais la décision ainsi prise indiquait que les victimes des actes de corruption reconnus par Glencore devraient, elles-mêmes, engager des procédures pour se faire indemniser, la juridiction anglaise ayant évoqué des difficultés pour elle de cerner, à chaque fois, le préjudice effectivement subi par les victimes éventuelles de Glencore. Dans l’assignation que APC Sarl a servie à Glencore Exploration Cameroon Ltd, filiale de Glencore au Cameroun, il est précisé ceci : «Du fait de la corruption exercée par la société Glencore sur les dirigeants de la Sonara, la société APC Sarl a perdu son contrat avec son fournisseur Nnpc du Nigeria et sa crédibilité, qui ont entraîné de ce faits sa paralysie» . Ce sont ces préjudices qu’elle entend voir réparer par le juge des référés. Assistance judiciaire Mais, avant d’engager formellement la procédure de réparation de ce préjudice, les promoteurs de APC Sarl ont d’abord pris le soin de le faire évaluer. Ainsi, toujours devant le juge de l’urgence du TPI de Douala-Bonanjo, APC Sarl, accusant Glencore Exploration Cameroon Ltd «d’avoir usé de ruse et de corruption pour lui extorquer la cargaison de 400 mille barils de pétrole brut de type "Bonny Light" de la Nigerian National Petroleum Corporation (Nnpc) qu’elle devrait livrer à la Sonara entre le 16 et le 18 novembre 1995» , sollicite la désignation d’un expert pour apprécier le préjudice qu’elle fixe elle-même à 25 milliards de francs. Après une bataille acharnée devant le juge des référés, dont Glencore a contesté la compétence, en vain, M. Gueta Joseph, expert judiciaire dans le ressort de la Cour d’appel du Littoral, est désigné à la tâche. Cette décision a été rendue le 23 octobre 2023. L’expert judiciaire ainsi désigné, qui disposait de 7 jours pour mener sa mission, s’est rapidement mis à la tâche. Et il a évalué le préjudice causé par Glencore à APC Sarl à 36,3 milliards de francs. Pour assigner Glencore à lui reverser les 36,3 milliards de francs du préjudice évalué par M. Gueta Joseph, les dirigeants de APC Sarl devrait s’acquitter de la consignation préalable d’une somme évaluée à presque 2,2 milliards de francs. Une somme faramineuse au regard de la situation actuelle de l’entreprise camerounaise. Pas à court d’idée, ses dirigeants ont sollicité une assistance judiciaire pour être exempté de payer ladite somme sans quoi l’accès à la justice pour elle était totalement compris. C’est la «commission d’assistance judiciaire instituée auprès du TPI de Douala Bonanjo» qui a étudié la demande de APC Sarl. Après examen du dossier, une «assistance judiciaire totale» a été accordée au demandeur. En conséquence, APC Sarl a été «dispensée du paiement de la totalité des frais engagés» dans le cadre de son combat judiciaire contre Glencore. Fort de cette décision, Glencore a été assigné «en reversement de sommes d’argent devant le juge des référés d’heure en heure» le 4 janvier dernier et la première audience a été programmée pour le lendemain. Devant le juge des référés où l’entreprise camerounaise se retrouve de nouveau en face de Glencore, elle entend surtout voir homologuer le rapport dressé par l’expert judiciaire, c’est-à-dire confirmer le montant du préjudice, puis ordonner à Glencore Exploration Cameroon Ltd de reverser la somme de 36,3 milliards de francs à APC Sarl en assortissant sa décision d’une astreinte de 100 millions de francs par jour de retard. L’issue de la procédure est fortement attendue compte tenu des aveux de corruption déjà fait par ce groupe devant les juridictions américaines et anglaise.

Pourquoi une entreprise camerounaise réclame 36,3 milliards de F à Glencore

La suite de la lecture de cet article (90% du reste du texte) est réservée à nos abonnés

La Cour d’appel donne un coup d’arrêt au braquage judiciaire de Danpullo contre MTN

Controverse sur les frais de l’examen d’accès au Barreau

LiéArticles

Premium Content

Abonnez-vous à notre newsletter pour recevoir l’actualité quotidiennes!

Categories

Welcome Back!

Create New Account!

Retrieve your password

Add New Playlist

Are you sure want to unlock this post?

Are you sure want to cancel subscription?