Le parquet requiert la condamnation des employés de la CCA

Par Odette Melingui - odettemelingui2@gmail.com L’affaire qui oppose le Crédit Communautaire d’Afrique (CCA) à M. Eyoum Aurélien, son ex employé et Maurice Ndoumbe Bebey, est sur le point de connaitre un dénouement. Sauf report, le 27 août prochain, le juge du Tribunal de grande instance (TGI) du Mfoundi va se prononcer sur le sort des deux accusés. C’est ce qui a été décidé à l’audience du vendredi, 19 juillet 2024. Les mis en cause, qui comparaissent libres, sont accusés d’avoir essayé de spolier la banque de fortes sommes d’argent, en compagnie de personnes non identifiées. Le projet n’aurait échoué que grâce à la dénonciation d’un autre employé de la CCA. Initialement qualifiés d’abus de confiance aggravé, les faits soumis à la justice sont désormais considérés comme constitutif de l’infraction de conspiration. A l’origine de cette affaire, une dénonciation de M. Yvan Jules Mindieme, contrôleur stagiaire à la CCA au moment des faits. Ce dernier a déclaré lors de son passage devant le tribunal qu’il est membre d’un groupe WhatsApp dénommé "Royale Times". Ce forum regroupe plusieurs personnes qui discutent de divers sujets. Au début du mois de décembre 2022, un certain Kevin le Lion, dont il ignore l’identité réelle, aurait fait une communication dans le forum demandant aux membres s’ils étaient en possession des cartes interbancaire Gimac-CCA. Cette carte est délivrée aux personnes disposant ou non d’un compte bancaire logé à la CCA et permet un accès aux services monétiques. « Je me suis signalé et Kevin le Lion m’a invité à une discussion en privée. Il utilisait un numéro étranger. Il m’a ensuite mis en contact avec son ami qui vit au Cameroun. Ce dernier devait en principe m’expliquer la démarche à suivre », avait-il déclaré. Le guet-apens Le témoin explique que l’ami de Kevin le Lion lui a expliqué qu’ils ont besoin de plusieurs cartes Gimac-CCA, le projet étant de faire des virements dans ces cartes à hauteur 200 millions chacune. Les personnes ayant mis leurs cartes à disposition pour la réussite de cette opération devraient recevoir pour leur collaboration une prime équivalent à 20% du montant perçu, soit 40 millions chacune. Pour ce faire, l’ami de Kevin le Lion lui a demandé une photo de sa carte Gimac-CCA reliée par un bout de papier où il devrait inscrire la date du jour, le ticket d’un distributeur et un relevé d’identité bancaire. Il lui a ensuite conseillé de vider son compte pour ne pas être spolié au moment de l’approvisionnement. Lorsqu’il s’est rendu compte que Jules Mindieme était septique à ses exigences, il l’a rassuré en lui envoyant les photos des cartes bancaires ayant déjà effectué cette opération. Parmi les 15 photos des cartes envoyées, se trouvait celle de M. Eyoum Aurélien, un employé de la CCA, agence de Minboman à Yaoundé, à l’époque des faits. « Quand je l’ai informé que je travaille dans cette banque, il m’a aussitôt répondu que c’est une opération bien organisée et que certains personnels de la banque sont impliqués. Je lui ai envoyé tous les documents qu’il a demandés et il était question que la banque approvisionne ces cartes-là. L’opération devrait se faire le weekend.» Malheureusement, la communication entre l’ami de Kevin le Lion et le témoin s’est interrompue lorsque les billets de banque ont été chargés et l’opération a été compromise. Informée de ces combines, la direction générale de la CCA s’est saisie de l’affaire et une enquête a été ouverte sous la conduite de la direction de la police judicaire. Un guet-apens a alors été mis sur pied au sein de la banque, et M. Eyoum Aurélien a été interpelé. Au cours de son audition, il a déclaré que c’est son cousin qui vit à l’étranger, qui lui avait demandé sa carte bancaire. Grâce au téléphone de l’ami de Kevin le Lion, les enquêteurs ont identifié M. Maurice Ndoumbe Bebey comme le propriétaire de la ligne téléphonique en question. C’est suite à cette enquête que les deux mis en causes ont été interpelés. La procédure judiciaire qui s’en est suivie a abouti à leur renvoi en jugement devant le TGI du Mfoundi où ils sont initialement été accusés des faits d’abus de confiance aggravé. Stagiaire Lors de ses réquisitions finales faites à l’audience du 19 juillet 2024, le représentant du ministère public a demandé au tribunal de déclarer les accusés coupables de l’infraction de conspiration. Il a soutenu qu’au regard des déclarations du témoin de l’accusation et des messages WhatsApp versés au dossier de la procédure, il est évident qu’il y a eu concertation de plusieurs personnes qui attendaient le moment propice pour agir et spolier la banque. Selon le parquet, aucun élément ne milite en faveur de l’acquittement des accusés. L’avocat de la CCA a partagé la position du ministère public. La banque espère se constituer partie civile au procès (c’est-à-dire une victime qui entend qui entend se faire dédommager) au cas où M. Eyoum Aurélien et Maurice Ndoumbe Bebey sont déclarés coupables. Pour l’avocat de M. Eyoum Aurélien, aucun élément matériel ni intentionnel n’a été présentés par l’accusation contre son client. Il a expliqué que ce dernier était stagiaire à la CCA au moment des faits et que le motif de l’aggravation de l’infraction ne peut pas prospérer. Me Sack, avocat de Maurice Ndoumbe Bebey, a quant à lui indiqué que la CCA est une institution dangereuse dans l’épargne au Cameroun. Selon l’homme en robe noire, ce n’est pas parce qu’il y a eu entente qu’il y a forcément conspiration. Il n’y a pas eu un commencement d’exécution. «On ne vous a présenté que des preuves circonstancielles et non des preuves directes. On ne peut pas attaquer une banque par téléphone ou par ordinateur. Comment un message WhatsApp peut mettre en difficulté le système informatique d’une banque comme la CCA?» , s’est-t-il interrogé. Le verdict est attendu le 27 août 2024.

Le parquet requiert la condamnation des employés de la CCA

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