Par Marie Bahané (Stagiaire) welaomari@gmail.com
Le torchant brûle entre Samuel, un homme de 60 ans et Tracy, une mère célibataire de 30 ans. Les deux tourtereaux se livrent une bataille sans merci devant le Tribunal de première instance (TPI) de Yaoundé centre administratif dans une affaire d’escroquerie. C’est Samuel qui est à l’origine de cette procédure. Il accuse son ex amoureuse secrète et Hugo, son frère aîné et chef traditionnel, d’avoir reçu une dot en compensation d’une promesse de mariage qui n’a jamais été tenue. Les accusés plaident non coupables.
En effet, Samuel raconte qu’en 2019, il a entrepris d’officialiser sa relation avec Tracy, une femme qu’il a connu par l’intermédiaire d’une connaissance. Il déclare avoir informé sa copine de ce qu’il était divorcé de sa première épouse. Le plaignant s’est donc engagé auprès des membres de la famille de Tracy en versant une dot constituée entre autres de quatre porcs, trois chèvres, des pièces de pagnes et une enveloppe de 10 mille francs. La cérémonie s‘est déroulée dans le village de la dame sous le patronage de Hugo, le chef de famille. Après quelques semaines de vie commune avec sa nouvelle compagne, Samuel, déclare que Hugo a débarqué à son domicile et a amené sa sœur avec lui. Il a saisi la justice par voix de citation directe pour réclamer la restitution de sa dot. D’où l’infraction d’escroquerie.
Négociation
Présents à l’audience, Tracy et Hugo rejettent les griefs retenus à leur encontre. Premier à prendre la parole, Hugo a expliqué au tribunal que Samuel l’a contacté en 2018 et prétendait vouloir épouser sa sœur. C’est ainsi que Samuel s’est acquitté partiellement de la dot en décembre 2018. Hugo souligne que les parents de Tracy n’ont pas approuvé leur relation, mais ont fini par accepter après avoir servi un moratoire à Samuel pour qu’il verse la dot restante. «Après négociation, il a amené Tracy chez lui le jour de la remise de la dot, malgré les contestations des parents de la jeune fille, qui soutenaient que c’est contraire à leur tradition qui voudrait que la nouvelle mariée soit remise à son époux en journée et non la nuit», a-t-il explique.
Le chef traditionnel explique qu’environ 4 semaines après le départ de sa sœur en mariage, cette dernière l’appelle au téléphone pour lui dire qu’elle est victime des violences physiques et verbales de la part d’une autre femme, qui est venue la tabasser à son nouveau domicile. Cette dernière prétendait être l’épouse légitime de Samuel. Hugo dit avoir effectué le déplacement et avoir été pris en partie par son beau-frère, qui a reconnu être encore marié à une autre femme. «Il m’a dit que la procédure de divorce était en cours. J’ai été surpris par cette nouvelle, parce que ce monsieur ne m’a jamais fait une telle révélation. J’ai donc fait sortir ma sœur de cette maison malgré les menaces et oppositions de son conjoint, qui exigeait la restitution de sa dot séance tenante.»
Deux autres femmes
Poursuivant son témoignage, Hugo relate qu’une plainte dirigée contre lui a été déposée par le plaignant à la suite de cette altercation. Il a d’ailleurs été auditionné et s’est engagé à restituer la dot qui lui a été réclamée en février 2020. Néanmoins il souligne que dans sa lettre d’engagement, il avait posé la condition que le plaignant retrouve sa dot à l’endroit où il l’avait déposé. C’est-à-dire à la chefferie de Zoetélé. «Le jour du rendez-vous, j’ai mis la dot querellée à la disposition de Samuel à l’endroit indiqué. Sauf que ce dernier ne s’est pas présenté jusqu’à ce jour. J’ai fait appel à un huissier de justice qui a fait le constat. La dot est restée là où elle avait été remise», a-t-il conclu son propos.
Tracy a pour sa part déclarée avoir été dans une relation amoureuse avec un homme qui est devenu aujourd’hui son bourreau. Elle raconte que pendant leur fréquentation, son amant ne lui a jamais montré son domicile et qu’ils se rencontraient toujours chez elle. La dame souligne que Samuel lui avait dit être divorcé de sa première épouse et prétendait être déçus. Elle s’est aperçue que son homme était encore marié pendant leur vie commune. Elle déclare également que Samuel s’absentait très souvent et lui expliquait qu’il avait beaucoup de travail à son lieu de service. « J’ai été agressée à deux reprises par deux femmes au domicile de mon conjoint. Toutes les deux prétendent être les épouses légitimes de Samuel et dont l’une est mère de quatre enfants.» Pour finir, Tracy dit avoir fait appel à son frère parce que ne se sentant plus en sécurité chez Samuel, qui entre temps était devenu agressif lui aussi. L’affaire revient le 24 septembre 2021 pour les réquisitions du ministère public et les plaidoiries des avocats.