Par Jacques Kinene-jkine7@yahoo.fr
La bataille judiciaire entre M. Tsanga Mballa Biloa, homme d’affaires, et Me Mezele Jean Pierre, notaire à Yaoundé, se poursuit devant la Cour d’appel du Centre avec ses sous-entendus. Le chef d’entreprise avait traduit le notaire devant le Tribunal de grande instance (TGI) du Mfoundi pour les faits d’abus de confiance aggravé. Il reproche à Me Mezele Jean Pierre d’avoir empoché la somme de 10,3 millions de francs destinés aux formalités de création d’une société anonyme dénommée «Terre Sainte». Le fait aggravant dans cette affaire est dû au statut de notaire mis en cause. Le TGI avait jugé et déclaré le notaire coupable des faits qui lui étaient reprochés le 6 mars 2020. Sauf que M. Tsanga Mballa Biloa n’avait pas été satisfait de ce jugement, estimant que le juge avait mal apprécié les faits au centre du procès. C’est la raison pour laquelle, il a saisi la Cour d’appel pour un réexamen du dossier. Le notaire a toujours clamé son innocence.
Selon l’accusation, l’affaire remonte en 2008 lorsque M. Tsanga Mballa Biloa, le plaignant, s’était rapproché de Me Mezele Jean Pierre dans le but d’ouvrir une société dénommée «Terre Sainte». Lors de la première rencontre l’homme d’affaires avait déposé la somme de 300 mille francs qui lui avait été demandée par le notaire. Il était revenu quelques jours plus tard, et avait déposé 10 millions de francs représentant le capital social de l’entreprise en création. Le représentant du parquet rappelle que M. Tsanga Mballa Biloa a précisé en déposant ce pactole, n’avoir pas exigé un reçu parce qu’il agissait sur la base de la confiance.
Le 10 août 2021, les deux parties ont répondu présent à la convocation de la Cour. Pour sa défense, Me Mezele Jean Pierre a rejeté les accusations portées contre sa personne. Il reconnaît n’avoir perçu du plaignant que la somme de 300 mille contre un reçu et une autre de 500 mille francs. Il soutient qu’il était en séjour à l’étranger au moment où le plaignant prétend lui avoir versé la somme de 10 millions de francs.
Dans ses réquisitions, le représentant du parquet a indiqué que les déclarations de l’accusé ne peuvent pas prospérer. D’après lui, M. Tsanga Mballa Biloa a bel et bien remis les fonds querellés au notaire qui les a détournés et n’a pas respecté la procédure normale de création d’une entreprise. Le magistrat estime que l’infraction d’abus de confiance est constituée et que Me Mezele Jean Pierre doit être puni d’un emprisonnement ferme de 5 à 10 ans et d’une amende de 100 mille à 1 million de francs, d’après l’article 318 alinéa 1 du Code pénal. Il note par ailleurs que ces sanctions doivent être doublées comme le prévoit l’article 321 du même code, étant donné que les faits décriés ont été commis par un notaire.
Cabale
L’avocat du plaignant s’est joint au ministère public pour demander la culpabilité de l’accusé. «Au lieu de déposer l’argent litigieux dans un compte bancaire, il en fait sa propriété profitant de la naïveté de mon client», a-t-il déclaré. Il a sollicité une réparation par rapport au lourd préjudice subi par l’homme d’affaires depuis près de 10 ans. Il demande la restitution de la somme de 10 millions de francs et le montant de 800 millions de francs représentant les dommages et intérêts.
Pour sa part, l’avocat de la défense pense que cette affaire relève du spectacle et serait un coup savamment monté par les adversaires du notaire. Dans son exposé, le conseil de l’accusé demande à la Cour de tenir compte uniquement de la chronologie des actes posés dans ce dossier. Ceux-ci démontrent à suffire que son client a fait son travail et est innocent dans cette affaire. Il s’agit du reçu qui atteste du versement de la somme de 300 mille francs le 20 octobre 2008, de la déclaration et de la souscription du capital le 3 novembre de la même année et l’enregistrement des statuts de l’entreprise au registre du commerce, le 7 novembre suivant.
«Cette affaire pose problème. Le plaignant qui porte sur lui une aussi importante somme, n’est pas accompagné. Le jour où il prétend avoir versé les 10 millions de francs, l’accusé déclare qu’il n’était pas au Cameroun. Enfin, le reçu du prétendu versement est signé par un autre notaire», a-t-il souligné. L’avocat pense que le reçu signé par sa consœur de regrettée mémoire ne peut être imputé à son client. Pour lui, le comportement du plaignant qui attend 2 ans pour réclamer le reçu du versement de 10 millions à Me Mezele Jean Pierre et 4 ans pour porter plainte contre ce dernier, est un fait curieux. Il demande aux juges de la Cour de déclarer son client non coupable de l’infraction d’abus de confiance aggravé pour faits non établis. La décision de la Cour est attendue le 14 septembre 2021.