Par Christophe Bobiokono – cbobio@gmail.com
C’est en principe le 25 mars prochain que démarre le procès en audiences publiques de l’affaire Martinez Zogo. Mais, en attendant, l’un des 17 mis en cause de cette procédure criminelle, M. Bidjang Oba’a Bikoro Bruno François, pour ne pas le nommer, comparaît en audience publique ce jeudi, 14 mars 2024, devant le Tribunal militaire de Yaoundé (TMY). Dans cette procédure qui le concerne de façon solitaire, en tout cas au stade actuel des informations disponibles, le directeur des médias du Groupe l’Anecdote répond de l’infraction de «propagation de fausses nouvelles». Depuis son interpellation le 7 février dernier par la gendarmerie, où il s’était présenté lui-même après avoir été informé, on ne sait comment, qu’il était recherché suite à un message-porté du commissaire du gouvernement près le TMY, le concerné a savamment entretenu le mystère sur les faits à l’origine de son incarcération, laissant libre cours à toutes les spéculations.
Les personnes qui se présenteront dans la salle d’audience du TMY jeudi prochain pour suivre l’ouverture de ce procès auront donc principalement à cœur de savoir ce qui est précisément reproché à l’homme des médias, au-delà de la qualification juridique qui lui a été notifiée le 23 février dernier au moment de sa mise en détention provisoire à la prison principale de Yaoundé. Il n’est pas sûr qu’ils en repartent suffisamment édifiés, même si la procédure pénale prévoit qu’avant l’ouverture des débats proprement dits, le tribunal présente au prévenu «la prévention», c’est-à-dire qu’il lui soit lu, par le greffier audiencier et à haute voix, l’accusation telle que formulée à son sujet dans l’acte de saisine du juge. Le tribunal lui demandera ensuite s’il plaide coupable, puis s’il entend se faire juger tout de suite. Il s’agit de l’accomplissement d’une sorte de rituel. Donc, même s’il répond qu’il est prêt à se faire juger, il n’est pas exclu que la suite du procès soit renvoyée à une autre date.
A quelle sanction judiciaire s’expose M. Bruno Bidjang par rapport au procès public qui démarre jeudi prochain ? Selon l’article 113 du code pénal, qui traite de la propagation de fausses nouvelles, une infraction de la famille des atteintes à la sûreté intérieure de l’Etat, «celui qui émet ou propage des nouvelles mensongères, lorsque ces nouvelles sont susceptibles de nuire aux autorités publiques ou à la cohésion nationale» est sanctionné d’un emprisonnement de trois (03) mois à trois (03) ans et d’une amende de cent mille (100.000) à deux millions (2.000.000) francs.
Plaider coupable ?
D’après certaines sources, le directeur du pool des médias du Groupe l’Anecdote projette de plaider coupable, ce qui signifie qu’il entend reconnaître devant le public qu’il est effectivement responsable des faits qui lui sont reprochés. Si cette information se confirme, cette attitude pourrait empêcher le tribunal de fouiner avant de rendre sa décision. C’est une stratégie qui augmente les chances pour le prévenu de bénéficier de larges circonstances atténuantes lors de sa condamnation et de bénéficier d’une remise en liberté rapide. D’ailleurs, son mandat de détention provisoire n’a pas fixé la durée de son incarcération. Il est simplement écrit sur le document que le régisseur de la prison principale doit «le conduire sous bonne et sûre escorte à l’audience du TMY siégeant à la descente du Génie militaire le 14 mars 2024 à 8h précis».
L’affaire Bruno Bidjang présente une particularité : c’est le silence qui entoure justement les faits précis de la cause jusqu’ici. Au lendemain de son interpellation intervenue le 7 février 2024 alors qu’il s’était volontairement présenté dans les locaux du Secrétariat d’Etat à la Défense (SED) chargé de la gendarmerie, la rumeur, distillée par un lanceur d’alertes proche du Groupe l’Anecdote, laissait-croire que le journaliste répondait d’un enregistrement vidéo tourné à la veille de l’augmentation des prix des produits pétroliers à la pompe. Selon l’enquête, disait cette rumeur, M. Bidjang était gardé pour avoir appelé les Camerounais à protester contre la vie chère. Mais, approché le 16 février par Kalara, le lieutenant-colonel Cerlin Bélinga, commissaire du gouvernement, avait totalement réfuté cette allégation. Il demandait à l’auteur de ces lignes de faire preuve de patience pour attendre le dénouement de l’enquête ouverte qu’il disait alors imminent.
L’infraction retenue contre M. Bidjang étant connue depuis le 23 mars 2024, Kalara était reparti à la rencontre du commissaire du gouvernement deux jours plus tard, toujours pour en savoir sur les faits précis reprochés au mis en cause et par quels moyens ils avaient été commis. «Il faut être à l’audience du 14 mars 2024 pour avoir l’information. Je ne puis rien vous dire pour le moment. Je suis tenu par le secret», avait répondu le magistrat-militaire. «Est-ce que vous maintenez comme vous l’avez dit lors de notre dernière rencontre que l’incarcération de cet homme de médias est sans rapport avec la vidéo en circulation sur les réseaux sociaux ?», avait insisté le reporter de Kalara. Après un petit temps de réflexion, le magistrat-militaire conseillait encore à son interlocuteur d’attendre le 14 mars. C’est donc toujours le flou total à la veille du procès.
La situation est d’autant intrigante qu’en dépit de l’obligation du secret dont se prévaut le commissaire du gouvernement par rapport à ce dossier, les premières réactions du Groupe l’Anecdote, qui emploie Bruno Bidjang, furent déroutantes au tout début de l’affaire, laissant penser que M. Amougou Bélinga et ses proches collaborateurs, en savaient suffisamment sur ce qui est reproché à l’un de ses plus fidèles poulains. Et même que ce qui lui était reproché était particulièrement grave. C’est d’abord M. Poné Isaac, l’administrateur directeur général (ADG) du Groupe l’Anecdote, qui se fendait d’un communiqué le jour même de l’interpellation de M. Bidjang pour dire qu’il est désormais «strictement interdit» à l’ensemble du personnel du groupe «de faire des analyses, des commentaires ou tout simplement de donner leur avis sur les sujets d’actualité, sur les réseaux sociaux».
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