Jamais controverse n’a été aussi vive que celle soulevée en juin 2016, au lendemain du dépôt à l’Assemblée nationale, du projet de loi portant nouveau Code pénal de la République du Cameroun. En première ligne de la contestation se trouvait l’Ordre des avocats. Le texte proposé aux parlementaires prévoyait quasiment une immunité judiciaire aux membres du gouvernement. Il consacrait la pénalisation du défaut de paiement des loyers, mais il était muet sur l’enrichissement illicite. En un mot, un texte sur mesure, pour protéger les intérêts des détenteurs des pouvoirs, notamment les serviteurs de l’Etat, sans apporter de réponse efficace au détournement des biens publics, véritable cancer social dans le pays.
Si le projet de loi alors défendu par le Garde des Sceaux essuyait logiquement une volée de bois vert de la part de nombreux acteurs sociaux, c’est qu’il avait surpris en plusieurs de ses aspects les observateurs avertis de la justice. Avant l’arrivée du ministre d’Etat Laurent Esso à la tête du ministère de la Justice, son prédécesseur avait conduit tous les travaux préparatoires de la réforme du Code pénal. Laissant au maximum la main aux techniciens du droit et des affaires judiciaires, il avait accepté de criminaliser l’enrichissement sans cause. Mais, entouré de quelques collaborateurs, le nouveau Garde des Sceaux avait gommé ce qui s’annonçait comme une avancée sans précédent de la lutte contre la prévarication des biens publics. Ce revirement à lui seul soulignait la divergence de vision et d’approche managériale entre Amadou Ali et Laurent Esso.
Pour la décennie qu’il avait passée à la tête du ministère de la Justice, de 2001 à 2011, si Amadou Ali n’a pas eu le plaisir de conduire à son terme la réforme du Code pénal, il aura été à la baguette, jusqu’au 27 juillet 2005, dans une grande partie du processus consacré à l’adoption d’un Code de procédure pénale unique pour l’ensemble du pays. Un document jugé avant-gardiste en matière de défense des droits de la défense et de respect des droits de l’Homme, qui a gommé les différences procédurales en la matière entre les anciens Cameroun francophone et anglophone. Conscient de ses limites techniques mais totalement décomplexé au vu de sa stature politique, il avait mené à bien le chantier en s’appuyant pleinement sur ses collaborateurs, dont le ministre délégué Maurice Kamto.
Opération épervier
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