Partenaires d’affaires hier, ennemis jurés aujourd’hui, ainsi se présente désormais la relation entre M. Atta, promoteur d’une entreprise spécialisée dans les travaux publics et M. Nguebai, un ingénieur de génie civil, détenu à la prison centrale de Yaoundé depuis 2021. L’ingénieur est poursuivi pour abus de confiance devant le Tribunal de première instance (TPI) de Yaoundé-centre administratif. M. Atta, le plaignant reproche à M. Nguebai de n’avoir livré que 17 forages sur les 50 qu’il devait réaliser dans les quatre départements de la région de l’Adamaoua en 2018. Le courroux du plaignant vient du fait que l’ingénieur qui était sous-traitant de son entreprise avait déjà empoché l’importante somme de 210 millions de francs pour l’ensemble de 50 forages qu’il n’a finalement pas exécutés en totalité.
Le 25 février 2022, en répondant aux questions du parquet, M. Atta qui n’est pas allé au bout de son témoignage explique que sa rencontre avec M. Nguebai remonte en 2018. Adjudicataire d’un marché public auprès du ministère de l’Eau et de l’Energie dans le cadre du plan d’urgence triennal dans la région château d’eau du Cameroun (Adamaoua) il avait sollicité les services de l’ingénieur Nguebai pour la réalisation des travaux querellés. Ce dernier lui avait été conseillé par des connaissances, notamment, Roger Ngama et Parfait Nguemé, respectivement délégué départemental de l’Eau et de l’Energie du Dja et Lobo, et chef de brigade du contrôle des marchés publics du même département.
À en croire l’accusation, les deux personnalités avaient expliqué que M. Nguebai était spécialisé dans la réalisation des forages d’eau. Ce sont ces assurances qui ont déterminé le plaignant à prendre attache avec le cabinet de l’ingénieur. Après négociations, les deux hommes d’affaires étaient tombés d’accord sur la somme globale de 210 millions de francs pour l’aménagement de 50 points d’eau. À l’issue de cette entente, M. Atta avait remis à l’ingénieur la somme de 111 millions de francs qu’il avait perçue auprès du ministère de l’Eau et de l’Energie pour le démarrage des travaux. 7 mois après le lancement des travaux à Ngaoundéré l’ingénieur aurait sollicité auprès de M. Atta un autre appui financier pour résoudre des problèmes auxquels il faisait face. Ce dernier avait exigé que le sous-traitant lui présente l’état d’avancement des travaux avec des justificatifs financiers.
Seulement, l’ingénieur ne s’était pas exécuté, souligne l’accusation qui indique que le mis en cause avait réagi plus tard après des pressions, en envoyant des photos et vidéo à M. Nguebai. Dans les prises de vue dont il s’agissait, on pouvait voir des forages érigés ainsi que des ouvriers à l’œuvre. Le mis en cause donnait, par ailleurs, les assurances au plaignant que 17 forages avaient déjà été réceptionnés par la délégation régionale de l’Eau et de l’Energie et qu’il ne restait que 33 autres points d’eau à livrer. Des arguments qui auraient convaincu M. Atta à envoyer une somme supplémentaire de 45 millions de francs à la demande de l’ingénieur pour la continuation du travail.
En 2020, une réunion d’évaluation des travaux litigieux à laquelle M. Atta et son partenaire d’affaires étaient conviés, avait été convoquée par le délégué régional du ministère de l’Eau et de l’Energie de Ngaoundéré. Avant de s’y rendre, le plaignant explique avoir pris le soin de se rassurer au préalable auprès de son sous-traitant de l’état d’avancement du projet et avait fait un virement de 200 mille à ce dernier pour ses frais de déplacement pour Ngaoundéré. Grande sera sa surprise lorsqu’il entendra des délégués départementaux déclarer que son entreprise n’a jamais été sur le terrain. Pour vérification, un véhicule avait été mis à leur disposition pour une descente sur le terrain pour vérifier que les forages prétendument livrés, avaient effectivement été réalisés. Le constat sur le terrain sera amer. Les personnalités ne trouveront aucun forage construit. C’est ainsi que le plaignant dit n’avoir pas obtenu les payements qu’il attendait dans le cadre de ce marché. Pis, son entreprise sera interdite de postuler aux marchés publics. C’est la raison pour laquelle, il a saisi la justice pour obtenir réparation. L’affaire revient le 25 mars 2022 pour la suite de l’interrogatoire du plaignant par son avocat.