L’affaire qui oppose M. Ahmadou Sardaouna, Directeur Général (DG) de la Société Immobilière du Cameroun (SIC) à M. Samuel Bondjock, Directeur de publication du journal Direct Info, est loin de connaître un dénouement. Ces deux-là s’affrontent devant le Tribunal de première instance (TPI) de Yaoundé centre administratif (CA) à la suite d’une citation directe introduite par le DG de l’établissement public, qui accuse le journaliste de diffamation par voie de presse. La deuxième audience consacrée à cette affaire a eu lieu le mardi 10 mai 2022, en l’absence du plaignant. L’audience n’a duré qu’une poignée de minutes, le temps pour le tribunal de renvoyer l’affaire au 12 juillet 2022 pour l’ouverture éventuelle des débats.
Il ressort de la citation directe (plainte) dont votre journal a obtenu copie que dans sa parution du 1er décembre 2021 ayant pour titre principal, «Célestine Ketcha Courtes siffle la fin de la recréation», M. Bondjock Samuel, le DP de Direct Info, avait accusé M. Ahmadou Sardaouna de complicité dans une affaire de construction irrégulière sur le site d’Olembe. Selon l’accusation, le journaliste était revenu à la charge dans son édition du 21 février 2022, avec un article avec pour titre : «Cameroun-contreperformances : 4,9 milliards pour sauver la SIC». A la lecture de cet article, le DG de la SIC soutient que le mis en cause fait des affirmations gratuites et infondées, l’accusant d’être responsable de la situation «chaotique» qui sévirait au sein de l’entreprise publique. Il s’étonne ce certaines allégations du journal, notamment lorsqu’il affirme que «les directives et les orientations du conseil d’administration semblent ne pas être respectées par la direction générale, au regard des différentes réserves formulées par la quasi-totalité des administrateurs…»
Intérêts funestes
Ainsi, lit-on dans la citation-directe, «après une litanie de statistiques impertinentes des états financiers antérieurs à la nomination du plaignant à la tête de la SIC, on peut aisément comprendre qu’il s’agit en réalité», selon l’accusation, d’un acharnement qui n’a qu’un objectif : une diffamation servant des intérêts funestes. Le plaignant indique également dans sa plainte qu’à la lecture de l’article incriminé du 21 février 2022, il n’y a pas de doute que le journaliste avait usé à son encontre des propos diffamatoires réprimés par l’article 305 du code pénal. Cet article punit d’un «emprisonnement de six jours à dix mois et le paiement d’une amande de 5 000 à 2 000 000 de francs ou de l’une de ces deux peines seulement, celui qui, par l’un des moyens prévus à l’article 152, porte atteinte à l’honneur ou à la considération d’une personne en lui imputant directement ou non des faits dont il ne peut rapporter la preuve. Que ces peines s’appliquent également aux auteurs de diffamation commis par voie de presse écrite, radio ou télévision, sans préjudice du droit de réponse et du devoir de rectification (…)»
Dans sa plainte, le DG de la SIC soutient que dans la publication litigieuse, M. Bondjock Samuel lui impute directement des faits précis et sans aucune preuve, notamment la responsabilité d’une situation financière qu’il décrit comme chaotique, due selon lui, non seulement au non-respect des orientations et directives du conseil d’administration, mais aussi à la consommation dans les dépenses de fonctionnement, de toutes les dépenses locatives collectées par la Sic.
S’agissant du paragraphe relatif à la consommation des dépenses de fonctionnement, des ressources locatives collectées par la SIC et celui relatif au non-respect des directives et orientations du conseil d’administration, le DG de la SIC soutient que le rédacteur de l’article incriminé le désigne subtilement comme étant le responsable d’une négligence. C’est pour toutes ces raisons que M. Ahmadou Sardaouna a saisi le tribunal pour être rétabli dans son honneur qui a été bafoué. Il a annoncé sa constitution comme partie civile et réclame à M. Bondjock Samuel les dommages et intérêts dont il entend indiquer le montant si le journaliste est déclaré coupable. Il demande également au tribunal de déclarer le journal Direct Info solidairement responsable des condamnations pécuniaires qui seront prononcées contre son directeur de publication.
Acharnement judiciaire?
Pour sa défense M. Bondjock Samuel, qui dit faire l’objet d’un véritable acharnement judiciaire de la part du DG de la SIC, déclare qu’il assume son article et plaide non coupable des faits de diffamation par voie de presse qui lui sont reprochés. «Le DG de la SIC m’accuse de diffamation alors que tous les documents que j’ai utilisés pour produire mon article sont les documents authentiques, incontestés et incontestables, vérifiés et vérifiables», a-t-il confié.
L’audience a été renvoyée au 12 juillet 2022, car les deux parties ont entrepris des démarches de conciliation en vue d’un arrangement à l’amiable, en marge du dénouement des deux procès engagés contre M. Bondjock Samuel. Signalons que le DP de Direct Info fait l’objet de deux procédures judiciaires engagées contre sa personne par le DG de la SIC dans deux citations directes distinctes. La première citation directe est relative à une affaire où il est accusé de construction illégale d’une mosquée sur le site d’Olembe. Cette affaire passe pour la deuxième fois à l’audience du 26 mai 2022. Il a également saisi le Conseil National de la Communication (CNC) pour les mêmes faits et la décision de l’instance de régulation est attendue. La deuxième citation concerne la procédure judiciaire pendante relative à la situation dite chaotique de la SIC. Affaires à suivre.