Apr\u00e8s 36 ans de \u00abloyaux service\u00bb dans l\u2019arm\u00e9e, Philippe Sidze est aujourd\u2019hui sans domicile fixe. Il vit pratiquement dans la rue avec femme et enfants. Adjudant-chef major \u00e0 la retraite depuis janvier 2016, il poss\u00e9dait pourtant une maison d\u2019habitation et un snack-bar en face du Lyc\u00e9e d\u2019Ekounou \u00e0 Yaound\u00e9, mais toutes ces b\u00e2tisses ont \u00e9t\u00e9 d\u00e9molies le 4 juillet 2017 sur ordre du sous-pr\u00e9fet de Yaound\u00e9 4. Le site en question est utilis\u00e9 comme voie d\u2019acc\u00e8s au Centre national des op\u00e9rations d\u2019urgence de Yaound\u00e9.<\/p>\n
Le dossier des d\u00e9molitions all\u00e9gu\u00e9es a rebondi devant le Tribunal administratif de Yaound\u00e9 le 7 septembre dernier. C\u2019est M. Sidze qui a saisi la juridiction le 21 d\u00e9cembre 2017 pour solliciter la condamnation du minist\u00e8re de l\u2019Administration Territoriale (Minat) \u00e0 lui payer 21,7 millions de francs de dommages et int\u00e9r\u00eats en r\u00e9paration du pr\u00e9judice qu\u2019il dit avoir subi du fait de la destruction de ses immeubles.<\/p>\n
Pendant son intervention, le militaire \u00e0 la retraite a expliqu\u00e9 que l\u2019affaire tire sa source d\u2019un d\u00e9cret dat\u00e9 du 23 mai 1966 sign\u00e9 par le Premier ministre du Cameroun Oriental, Simon Pierre Tchoungui, portant expropriation de 233 hectares de terres n\u00e9cessaires aux travaux d\u2019extension de ce qui n\u2019\u00e9tait alors que \u00abl\u2019a\u00e9rodrome de Yaound\u00e9\u00bb. Les terrains expropri\u00e9s sont situ\u00e9s \u00e0 cheval entre les quartiers Ekounou et Nkomo.<\/p>\n
Terrains non immatricul\u00e9s<\/strong><\/p>\n Dans les ann\u00e9es 1980, \u00e0 cause de la pouss\u00e9e urbaine, le gouvernement d\u00e9cidait de d\u00e9localiser l\u2019a\u00e9roport vers un site retir\u00e9 de la ville. C\u2019est la localit\u00e9 de Nsimalen qui a \u00e9t\u00e9 retenue \u00e0 cet effet. Une bonne partie des terrains expropri\u00e9s en 1966 et non utilis\u00e9s lors de l\u2019extension de l\u2019a\u00e9rodrome de Yaound\u00e9 \u00e9taient r\u00e9troc\u00e9d\u00e9s aux collectivit\u00e9s coutumi\u00e8res et occupants initiaux des lieux. Parmi les b\u00e9n\u00e9ficiaires de cette mesure, on compte la famille de feu Th\u00e9ophile Abega, l\u2019ancien Lion Indomptable, Th\u00e9r\u00e8se Ada, etc.<\/p>\n En 1988, Mme Ada vendait un lot r\u00e9troc\u00e9d\u00e9 d\u2019une superficie de 400 m\u00e8tres carr\u00e9s \u00a0\u00e0 M. Fru Richard Ngonge. Deux ans plus tard, le 12 novembre 1990, M. Ngonge a \u00e0 son tour revendu la moiti\u00e9 dudit lot, soit 200 m\u00e8tres carr\u00e9s, \u00e0 M. Sidze. Toutes ces transactions immobili\u00e8res ne se sont pas d\u00e9roul\u00e9es devant un notaire comme l\u2019exige la loi, parce que les terrains n\u2019\u00e9taient pas immatricul\u00e9s. \u00abIl n\u2019y avait eu aucune contestation tant de la part de l\u2019Etat que de toute autre personne\u00bb, d\u00e9clare M. Sidze. Il indique que c\u2019est le calme apparent qui l\u2019a \u00abd\u00e9termin\u00e9\u00bb \u00e0 investir sur le lot.<\/p>\n Alors que l\u2019occupation du site querell\u00e9 ne faisait l\u2019objet d\u2019aucune contestation, M. Sidze raconte qu\u2019il a \u00e9t\u00e9 surpris de recevoir le 30 juin 2017 une mise en demeure du sous-pr\u00e9fet de Yaound\u00e9 4 l\u2019invitant \u00e0 \u00ablib\u00e9rer imm\u00e9diatement\u00bb dans les \u00ab72 heures\u00bb \u00able site abritant ses mises en valeur \u00e9rig\u00e9es par ses soins\u00bb, \u00abau plus tard le mardi 4 juillet 2017\u00bb. \u00abPass\u00e9 ce d\u00e9lai, pr\u00e9venait le chef de terre, lesdites constructions seront d\u00e9molies \u00e0 ses frais par la municipalit\u00e9 sans pr\u00e9judice des poursuites judiciaires.\u00bb Le sous-pr\u00e9fet motivait sa d\u00e9cision en pr\u00e9tendant que les biens dont la destruction \u00e9tait projet\u00e9e sont \u00e9rig\u00e9s sur \u00able domaine public de l\u2019Etat, objet du titre foncier N\u00b051796\/Mfoundi\u00bb.<\/p>\n Selon le plaignant, avant le 30 juin 2017, il n\u2019avait jamais re\u00e7u une sommation de lib\u00e9rer son terrain au pr\u00e9texte qu\u2019il fait l\u2019objet d\u2019une expropriation pour cause d\u2019utilit\u00e9 publique. Mieux, il a plus tard d\u00e9couvert en proc\u00e9dant \u00e0 des investigations que le titre foncier dont s\u2019est pr\u00e9valu l\u2019administration pour justifier la casse d\u00e9plor\u00e9e a \u00e9t\u00e9 \u00e9tabli le 29 novembre 2012, soit 22 ans apr\u00e8s qu\u2019il ait occup\u00e9 le site \u00e0 probl\u00e8mes.<\/p>\n Apr\u00e8s la casse, le plaignant dit avoir introduit une s\u00e9rie de recours aupr\u00e8s de certains ministres dans le but d\u2019obtenir le d\u00e9dommagement de ses biens. En r\u00e9action, il lui \u00e9tait sugg\u00e9r\u00e9 de saisir le sous-pr\u00e9fet de Yaound\u00e9 4 \u00abqui a pr\u00e9sid\u00e9 la commission de recensement et d\u2019\u00e9valuation des indemnit\u00e9s relativement au site litigieux\u00bb. Toutes ses d\u00e9marches aupr\u00e8s du chef de terre sont rest\u00e9es infructueuses.<\/p>\n \u00abOccupant de bonne foi\u00bb<\/strong><\/p>\n M. Sidze estime qu\u2019il m\u00e9rite une \u00abjuste indemnisation\u00bb parce qu\u2019il \u00e9tait \u00abun occupant de bonne foi\u00bb. Il indique que la destruction de ses biens lui cause un \u00ab\u00e9norme pr\u00e9judice\u00bb puisqu\u2019il s\u2019est \u00abefforc\u00e9 de construire ses maisons au prix de nombreux sacrifices\u00bb. Une expertise a \u00e9valu\u00e9 les biens litigieux \u00e0 21,7 millions de francs. Il n\u2019a pas h\u00e9sit\u00e9 \u00e0 \u00e9taler ses \u00e9tats de service dans l\u2019arm\u00e9e effectu\u00e9 parfois \u00abau p\u00e9ril\u00bb de sa vie.<\/p>\n En prenant ses r\u00e9quisitions dans la proc\u00e9dure, le minist\u00e8re public a demand\u00e9 au tribunal de rejeter le recours de l\u2019ex-militaire arguant les biens querell\u00e9s se trouvaient sur le domaine public de l\u2019Etat. Avant les interventions des parties au proc\u00e8s, le juge-rapporteur qui a pr\u00e9alablement analys\u00e9 le dossier pour le compte de la juridiction a sugg\u00e9r\u00e9 aux juges de donner gain de cause \u00e0 M. Sidze au motif qu\u2019il s\u2019est install\u00e9 sur le site \u00e0 probl\u00e8mes longtemps avant l\u2019\u00e9tablissement du titre foncier N\u00b051796\/Mfoundi. Le prononc\u00e9 du verdict est attendu le 24 septembre prochain.<\/p>\n","protected":false},"excerpt":{"rendered":" Apr\u00e8s 36 ans de \u00abloyaux service\u00bb dans l\u2019arm\u00e9e, Philippe Sidze est aujourd\u2019hui sans domicile fixe. Il vit pratiquement dans la rue avec femme et enfants. 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